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Coeur

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Titre du CD Benoît Mernier: Missa christi regis gentium, Inventions pour orgue
Interprète(s) Xavier Deprez (BE) & Chœur de chambre de Namur, Capella Sancti Michaelis, dir. Olivier Opdebeeck (1-4)
Benoît Mernier (BE) (5-9)
Éditeur Cyprès
Numéro d'édition 4612
Site de l'éditeur http://www.cypres-records.com
Format audio DDD
Date d'enregistrement 10-11 VII, 30 XI, 2 XII 2000
Minutage total 62:58
Date de réception au M'O 20/11/2001
Livret 28 pages (F, NL, GB, D), pas de composition, pas de registrations
Orgue(s) et/ou instrument(s) Bruxelles, BE, Cathédrale
Compositeur(s) Benoît Mernier
Descriptif orgue(s)Bruxelles, BE, Cathédrale. Grenzing (DE) 2000. IV/63
Accord orgue(s)555 dans l'échelle de La Rasette razette
ProgrammeBenoît Mernier
1-4. Missa Christi Regis Gentium 5-9. Cinq Inventions
CommentaireLa critique de ce CD me pose d'entrée de jeu un problème d'ordre déontologique. J'ai travaillé avec Benoît Mernier durant de longues années. Après qu'il ait fait une bonne partie de ses études d'organiste dans ma classe, il devint mon chargé de cours et je regretterai toujours que nos itinéraires se soient séparés, sa carrière pédagogique le conduisant sur d'autres chemins. Cette période de quelque trois lustres de travail partagé, de véritable communion dans la musique, aurait-elle été aussi longue, si n'existait pas entre nous une compréhension mutuelle, un large partage d'opinions, une vraie amitié?
Je crois cependant pouvoir faire la part des choses, et écouter cette musique comme si elle était née d'un compositeur inconnu. Faites-moi, amis lecteurs, la faveur de croire que je ne suis pas encore devenu assez fat pour aimer une pièce - en l'occurrence la première des Inventions, les autres l'étant à Jean Boyer, Pascale Rouet, François Espinasse et Bernard Foccroulle - simplement parce qu'elle m'est dédiée!
Une question qu'on ne peut pas se poser, entendant aussi bien la Messe que les Inventions de Benoît Mernier est celle de savoir pourquoi cette musique fut écrite. Il y a ici une évidence, un naturel qui convainquent. Pas d'effet inutile, pas de complexité gratuite - et pourtant, en particulier dans la Messe, rien n'est vraiment simple! C'est au talent et au travail individuel et collectif des chanteurs du Ch?ur de chambre de Namur et de la Capella Sancti Michaelis, deux ensembles plutôt associés à la musique ancienne, dirigés de main de maître par Olivier Opdebeeck, que l'auditeur doit de ne pas être accaparé par la réelle complexité d'écriture, les exigences des subtilités rythmiques, la difficulté d'intonation de la Messe, pour ne rien dire de la complication causée par l'éloignement de l'organiste, perché à sa tribune.
Commandée par Henri Lambert, l'aumônier de la Messe des Artistes de la Cathédrale, la Missa Christi Regis Gentium avait déjà fait forte impression lors de sa création et méritait bien d'être enregistrée (car, hélas, on peut imaginer qu'elle ne sera pas souvent mise sur pied, du moins dans le cadre d'une liturgie). J'ai retrouvé avec la même émotion qu'au concert, l'impressionnant arsis-thésis du Kyrie, saisissante réduction de l'immense arc que sera l'entièreté de la Messe, et les beaux contrastes du Gloria, avec les interventions de l'orgue, où le compositeur retrouve, dévoile ses racines. Mais la place me manque pour détailler cette musique: écoutez-la! Et appréciez comme moi la qualité de l'interprétation, avec mention spéciale pour Xavier Deprez, dans une partie bien difficile.
Dans les Cinq Inventions (le titre est particulièrement bien choisi, à la fois par sa référence à notre maître à tous, et pour indiquer que l'auteur entend dans chacune exploiter toutes les ressources d'une idée génératrice), Benoît Mernier démontre que l'on peut faire de la musique dans un langage dégagé de références au passé, sans faire appel à toutes les ressources bruyantes de l'instrument. Les registrations se cantonnent en effet à des mélanges très simples, voire même, bien souvent, à des jeux seuls: la musique importe plus que l'effet. Le compositeur affectionne particulièrement le jeu de «trompe-l'oreille» créé en recomposant des harmonies par le biais des mutations, et nous fait aussi profiter de quelques jolis passages explosés, dans l'espace, jouant sur l'étagement des plans sonores de l'instrument. Soulignons au passage la parfaite adéquation du grand Grenzing de la cathédrale à cette partition qui semble conçue pour pouvoir tout aussi bien être jouée sur un petit instrument. Comble de bonheur, pour un compositeur interprète, les Cinq Inventions font l'objet, quasiment en même temps que la sortie de leur enregistrement, de l'édition en partition (voyez ce M'O, p. 56) [P_3676].
Je n'ai pas souffert, à l'écoute de ces cinq pièces, du sentiment souvent éprouvé dans la musique actuelle, de ne pas comprendre, voire même de ne pas entendre. C'est sans aucun doute une des grandes qualités de Benoît Mernier: il écrit une musique très réfléchie, pensée à l'extrême, architecturée (l'auditeur attentif saisira bien que ces pièces ne sont pas isolées, mais chaînées entre elles par des liens discrets mais perceptibles) et cependant naturelle, facile et agréable à écouter. Comme moi, vous ne vous lasserez pas de réécouter la dernière partie de la deuxième Invention dont le babil carillonnant est à l'image de toute la musique qui nous est proposée sur ce CD: vivante, imagée, colorée, inventive, intelligente et simplement belle.

[M'O 67/09]
Date du commentaire06/05/2010
  
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